La Minute Bancaire – Quantitative Easing Thomas Truffer

Depuis 2008, les économies de la Triade (USA, U.E et Japon) sont sous perfusion monétaire. En effet, depuis la crise des subprimes les banques centrales de ces zones économiques opèrent une politique monétaire dénommée « Quantitative Easing » (Q.E ou « assouplissement monétaire » en français). Cette politique repose sur un mécanisme simple qui est la création massive de monnaie, injectée directement dans l’économie par la Banque Centrale Européenne, accompagnée d’un taux directeur à 0.

Pour résumer simplement cette politique, on peut dire que les banques centrales « font tourner la planche à billet ». Si habituellement la création de monnaie est très contrôlée et limitée aux besoins en financement de l’économie, avec le Q.E les masses de liquidités créées sont décorrélées des besoins « réels » de l’économie. Le but du Q.E est, dans un contexte économique grippé, de relancer la croissance par une intervention directe des banques centrales dans l’économie, essentiellement sur les marchés financiers.

Depuis 2008, le Q.E a permis aux états européens de financer leurs politiques budgétaires. Ces derniers émettent de la dette (des obligations) financée par les banques commerciales et ces titres sont immédiatement rachetés par la BCE. Les états peuvent ainsi continuer d’opérer, avec des obligations à taux frôlant zéro, sans être inquiétés par le remboursement de leur dette. Les banques commerciales quant à elles disposent donc d’une quantité de liquidité devant permettre à la machine économique de reprendre un rythme sain et naturel. Or, ces fonds ont beaucoup servi à la spéculation sur les marchés financiers, donnant l’illusion d’une croissance puisque les actions voyaient leurs prix grimper. Le Q.E en Europe a été amplifié depuis la crise sanitaire, ce qui a accentué ce phénomène.

La BCE a annoncé vouloir cesser cette politique monétaire afin que l’économie européenne regagne en indépendance. Cette annonce a eu pour effet de faire chuter les marchés financiers (le CAC 40 est à -8% depuis) et de faire remonter les taux d’intérêts des obligations à 10 ans des états européens- alors qu’il était autour de 0 (de 0% à 2,24% pour la >France, de 0,9% à 4,08% pour l’Italie). Cette hausse des intérêts a pour effet de faire chuter la valeur des obligations actuellement sur les marchés et pose un important problème de financement puisque les états ne sont plus habitués à devoir rembourser de telles quantités d’intérêts.

La situation actuelle est donc un véritable dilemme : continuer « la fuite en avant » du Quantitative Easing dont nos économies sont devenues dépendantes, ou bien « décrocher » et faire face au séisme économique que cela déclenchera. Le dilemme est double pour les gouvernements qui devront choisir au moment de payer les pots cassés entre l’austérité, induisant des coupes budgétaires des fonctions régaliennes comme l’éducation et la sécurité, ou bien la hausse des impôts.