Quelles sont les exigences de la BCE pour les données bancaires ? – Guilhem Czarniak

 

La crise des subprimes, survenue en 2007, a ébranlé le système bancaire mondial et provoqué l’intervention des États et des banques centrales dans le sauvetage des institutions financières. Cette crise riche en enseignements, notamment en ce qui concerne la solvabilité des organismes bancaires et assurantiels, a poussé les pouvoirs publics et les banques centrales à intervenir directement auprès des banques. 

En conséquence directe de cette perturbation financière, la Banque Centrale Européenne s’est dotée d’une nouvelle mission : la supervision financière. Cette tendance est alors mondiale, avec la multiplication des exigences de publication des données, notamment comptables, des groupes bancaires. 

C’est ainsi qu’à partir du 1er janvier 2011, le mécanisme de surveillance unique (MSU) à l’échelon européen est mis en place. Celui-ci s’organise dans un premier temps autour d’un Comité du risque systémique et de trois autorités de supervision microprudentielles : une pour les banques (ABE), une pour les marchés (AEMF), et une dernière pour les entreprises d’assurance et les fonds de pension (AEAPP). 

L’objectif premier de la supervision bancaire est de prévenir la propagation rapide des problèmes macroéconomiques affectant le secteur financier, et donc leurs impacts sur les habitants des pays de l’Union Européenne. Cette initiative a aussi pour but de rétablir une confiance dans le système bancaire, écornée par la crise, et de renforcer la capacité de résistance des banques. Principale mesure, la mise en place d’exigences minimales et recommandations de fonds propres pour les banques de la zone euro au titre du pilier 2 (P2R). 

Dès 2014, la BCE assure la responsabilité de superviseur unique des institutions bancaires de la zone euro. Cette responsabilité lui permet alors de sanctionner les banques ne respectant pas les attentes en termes de reporting. À titre d’exemples, le Crédit Agricole avait écopé d’une amende de plus de 4 millions d’euros pour infraction aux règles de déclaration des fonds propres tandis qu’une filiale luxembourgeoise de Natixis s’était vu infliger une amende de près de 2 millions d’euros pour non-respect des obligations de déclaration en matière de limites et d’expositions importantes. 

Au gré des événements macroéconomiques ayant affecté la finance européenne et mondiale, les exigences de transmission de données par la BCE évoluent. C’est le cas lors de la crise du Covid avec la mise en œuvre provisoire de reporting de surveillance mensuelle sur les impacts de la pandémie et les mesures mises en œuvre pour les limiter. L’ensemble des mesures établies avaient pour objectif de prévenir les risques pesant sur le système bancaire et s’assurer de sa capacité de résistance. 

 

Quels types de données sont exigées par la BCE ? 

Données comptables (FINREP) : ces données financières (compte de résultat et bilan ventilés selon différents axes de gestion) transmises à un niveau social ou consolidé, selon des normes et un format standardisé, visent à s’assurer de la structure financière des banques, avec une attention particulière portée aux fonds propres. 

Données prudentielles (COREP, ANACREDIT) : ces données visent à s’assurer de la santé et de la stabilité des institutions financières et du système financier, pour ainsi prévenir les risques de crédit de contrepartie, de marché, ou plus largement les risques structurels et opérationnels. 

Données statistiques : ces données et indicateurs statistiques sur l’activité du secteur financier permettent aux autorités de contrôle de fixer leurs politiques monétaires et économiques. 

Données transactionnelles : déclaration des données transactionnelles à une fréquence élevée afin de surveiller en temps réel les marchés de capitaux. 

 

Et pour la suite ? 

Plusieurs projets sont menés par la BCE afin d’harmoniser les définitions des données exigées, et, in fine, d’alléger la charge liée aux reportings sur le secteur bancaire. 

À ce titre, les banques vont prochainement devoir engager des travaux afin de répondre au projet IReF (Integrated Reporting Framework) qui sera déployé à compter de 2024. En parallèle, un dictionnaire de données uniques (BIRD – Banks’ Integrated Reporting Dictionary) est en cours de formalisation. À noter que ces projets ne concernent pas deux des principaux reportings publiés par les banques, à savoir FINREP et COREP. 

Par ailleurs, la tendance actuelle s’inscrivant dans une augmentation de la supervision des risques financiers liés au changement climatique, les exigences de données liées à l’intégration de ces problématiques par les Banques européennes devraient s’accentuer dans les années à venir. Les stress tests climatiques réalisés en début d’année dernière, dont les résultats mitigés ont été publiés à l’été 2022, ont mené la BCE à publier une feuille de route pour la mise en conformité des banques européennes vis-à-vis de ses attentes prudentielles en termes de risques climatiques et environnementaux. Cette date est fixée à fin 2024.