Qu’est-ce que la performance ? Les indicateurs sont-ils toujours porteurs de sens ? – Clara Lamache
La performance est une notion couramment utilisée dans le domaine de la vie des entreprises. Malgré sa prépondérance au fil des années, la performance demeure un concept polysémique, complexe et difficile à définir. En effet, le mot « performance » est aujourd’hui un mot-valise qui dépend d’un contexte et qui renvoie à plusieurs notions et définitions différentes (Bourguignon, 1997).
Longtemps reconnu comme concept unidimensionnel mesurant les performances financières des entreprises à destination des actionnaires, son champ s’est, au fur et à mesure élargi pour devenir une notion multidimensionnelle, intégrant différentes dimensions (économique, financière, sociale, sociétale, environnementale…). L’émergence de ces dernières est le fruit de réflexions et de préoccupations actuelles qui touchent la société et, par effet domino, les entreprises. Aujourd’hui, face aux enjeux environnementaux, les entreprises sont obligées d’intégrer des indicateurs de performance ESG. L’accroissement du nombre de réglementations et de reporting auxquels sont assujettis les entreprises amènent celles-ci à se questionner sur leur performance de manière générale.
La performance est complexe à définir, car elle intègre différentes dimensions à appréhender. Elle représente la capacité à atteindre un objectif en utilisant des moyens et des résultats, dans un temps donné. Elle est associée à quatre principes fondamentaux (Marion et al, 2012) :
- L’efficacité: aptitude de l’entreprise à obtenir un résultat conformément à un objectif fixé, sans tenir compte de l’optimisation des ressources.
- L’efficience: aptitude de l’entreprise à obtenir un résultat en minimisant les coûts liés à l’utilisation des ressources et des moyens.
- La pertinence: aptitude de l’entreprise à obtenir une adéquation entre le résultat et les objectifs fixés, en relation avec les contraintes de l’environnement.
- La cohérence: aptitude de l’entreprise à obtenir un résultat lié à l’harmonie de ses composants de base, en rapportant les objectifs aux moyens.
Si la notion de performance peut vulgairement être définie à travers le positionnement stratégique de l’entreprise, ses ressources et la façon dont elle les met en œuvre, comme le souligne Bourguignon, d’autres notions sont également à intégrer :
- La performance est un succès qui intègre un jugement de valeur. Il s’agit d’une affaire de perception. La performance n’a d’importance que par rapport à ce que l’utilisateur de cette information va en faire.
- La performance est plurielle. Elle est le résultat de l’action, qui ne peut être réalisée sans motivation, sans adhésion, sans engagement. La performance est incontestablement concomitante à des initiatives individuelles et collectives. La dynamique de groupe joue un rôle prépondérant dans la performance des entreprises. Le manque de visibilité sur les objectifs de l’entreprise peut ainsi entraîner des conséquences néfastes sur la performance de la société. Entre mythe mobilisateur du discours managérial et manque d’appartenance du salarié à ces buts, il peut y avoir un décalage sur la finalité de la performance.
- La performance est une notion dynamique qui ne peut exister sans contrôle. Il est illusoire de soutenir la performance sans s’assurer des processus sous-jacents à l’atteinte de bons résultats. Ainsi, la notion de performance est généralement rattachée au concept d’évaluation et de mesure.
- La performance n’est jamais garantie, autrement nous vous proposerions un modèle universel qui garantirait votre réussite.
Sans mesure, la performance reste un concept flou, qui manque de structure, de réalité tangible. Pour rendre la performance concrète, l’entreprise utilise des indicateurs qui ont pour vocation d’indiquer l’adéquation entre les actions, les pratiques mises en place et les résultats fixés. Plus largement, les indicateurs vont donner une indication sur la pertinence de la stratégie mise en place et vont fixer un cadre au travers de critères et de variables mesurables.
Au-delà de disposer d’informations sur son organisation, de nombreux indicateurs sont également calculés pour des besoins réglementaires et de reporting.
Face à cet accroissement du nombre d’indicateurs auxquels les entreprises font face, se pose la question de leur pertinence. Effectivement, bien qu’essentiels au pilotage, les indicateurs peuvent, dans certains contextes, également se montrer extrêmement dangereux :
- Premièrement, le nombre croissant de reporting auquel les entreprises doivent se conformer impose une charge de travail plus conséquente dans la production d’indicateurs. Les ressources mobilisées dans l’élaboration de ces reporting ne participent pas à l’amélioration de ceux-ci. Par conséquent, un aspect néfaste réside dans la dé-focalisation de l’attention et des moyens d’actions ;
- Deuxièmement, dans la lignée du précédent point, les indicateurs sont calculés sur des variables mesurables, quantifiables. Ces calculs impliquent des process supplémentaires dans la collecte des données, leur traitement, l’implication des différentes parties prenantes, l’élaboration du reporting final… L’implication de plus de bureaucratie peut être un frein à l’innovation et à la créativité ;
- Troisièmement, il existe un risque de transformer le manager en exécutant. Celui dont le rôle est de veiller à la bonne organisation de ses équipes serait ainsi davantage obnubiler par la surveillance des indicateurs plutôt que par le travail en lui-même de ses collaborateurs ;
- Quatrièmement, alors que la performance s’obtient en donnant du sens à chacun, la création d’indicateurs peut être porteur de perte de sens. L’indicateur n’est pas un objectif en soit, il doit rester un instrument servant à fournir des indications sur un ou plusieurs éléments particuliers.
Comme vous l’aurez ainsi observé, tout au long de cet article, la performance dépend du sens qu’on lui donne. Chaque entreprise, chaque individu perçoit la performance de manière différente et aura une manière de l’évaluer qui variera selon des critères souvent subjectifs.
Ce qui, en revanche, s’observe est l’adéquation de cette notion avec d’autres concepts, comme celui de l’action collective. La performance organisationnelle ne peut être optimisée et durable sans une dynamique de groupe. Comme le soulignait Steve Jobs, « Les meilleures choses qui arrivent dans le monde de l’entreprise ne sont pas le résultat du travail d’un seul homme. C’est le travail de toute une équipe. »
Chez Hector, nous sommes persuadés que c’est la force humaine qui permet d’atteindre ses objectifs. La performance organisationnelle est avant tout une performance collective qui n’a de réelle valeur que si elle est partagée et consentie par des personnes engagées.