Qu’est-ce que le crédit carbone – Thomas TRUFFER

Signé en 1997 lors de la COP 3, le protocole de Kyoto est un des premiers accords internationaux visant directement la régulation et la réduction mondiale des gaz à effet de serre. C’est ainsi que les crédits carbones ont vu le jour. Un crédit carbone est une unité de mesure correspondant à l’émission de gaz à effet de serre. Celui-ci représente une tonne de CO2 (Tco2) et est un titre commercialisable sur le marché carbone (ou bourse du carbone).

 

Comment ça marche ?

Les signataires du protocole de Kyoto se sont engagés à imposer à leur industrie dans leur globalité des quotas d’émission de carbone. En conséquence, les entreprises concernées voient leurs émissions légalement limitées. Pour dépasser ces quotas d’émissions, elles doivent acquérir des crédits sur le marché du carbone. Ainsi, ces entreprises représentent la demande sur ce marché. De l’autre côté, les sociétés représentant l’offre sont celles qui ont émis moins de carbone que leurs quotas leur permettaient. Chaque tonne de CO2 qui n’a pas été émise peut ainsi être convertie en crédit carbone puis vendue sur le marché. Il est donc possible d’échanger ses quotas. L’autre manière d’obtenir un crédit carbone est de porter des projets de réduction d’émissions de gaz à effet de serre. Si les conditions sont réunies, ce projet peut apporter un nombre de crédits carbones équivalent aux réductions d’émission permises par le projet. Ainsi, l’entreprise porteuse du projet peut vendre ces crédits et financer son projet.

Ce système permet théoriquement un cercle vertueux de la décarbonisation où les plus grands pollueurs assurent leur activité en finançant la transition énergétique. Si la théorie est intéressante, qu’en est-il de la réalité ?

Est-ce que ça marche ?

La première critique émise envers les crédits carbone, est qu’ils ne sont qu’une demi-mesure. On reproche à ce concept de ne récompenser que la compensation carbone (une entreprise émet moins ou lance un projet vert, une autre entreprise peut alors polluer plus) alors que l’enjeu immédiat est la réduction nette des émissions de gaz à effet de serre.

L’autre critique est finalement la création d’un « droit de polluer » et la financiarisation de celui-ci. En effet, si l’on avait imposé des quotas à respecter sans permettre le commerce de ces quotas, cette restriction aurait été bien plus sévère, mais aurait aussi pu pénaliser fortement les économies des pays signataires. Dans cette situation, il est difficile d’affirmer que le protocole aurait récolté autant de signatures. La critique de la financiarisation des quotas et des crédits reste légitime puisqu’en créant un marché du droit à polluer, on prend le risque de laisser la spéculation et les fraudes s’y immiscer et provoquer des cours du crédit carbone qui ne seraient pas naturels au sens économique du terme.

Dans les faits, si on s’intéresse à la quantité d’émission de gaz à effet de serre depuis la mise en place du crédit carbone, on constate une augmentation constante et régulière de ces émissions. On peut alors voir le verre à moitié vide en considérant le dispositif comme inutile, ou bien à moitié plein en croyant que la situation aurait pu être pire sans ce dernier.